Départ matinal d'Arequipa pour une excursion de deux jours au canyon de Colca, l'un des hauts lieux touristiques du Pérou. Il y a bien du monde en cette pleine saison, nous sommes une quinzaine dans le minibus et en croisons de nombreux autres.
Le canyon de Colca est situé à 180 km au nord d'Arequipa, mais en fait nous n'y serons que demain car la route est longue et sinueuse, de plus c'est tôt le matin que volent les condors. Au programme de cette première matinée, rejoindre Chivay, village aux portes du canyon de Colca ; quatre heures de route parmi des paysages magnifiques nous y mèneront.
Nous traversons la réserve naturelle de pampas Cañahuas, pampa d'altitude aux pieds des volcans Misti et Chachani où vivent des troupeaux de vicuñas. C'est l'un des rares endroits du Pérou d'ailleurs où il est possibe d'observer tant de vigognes car elles sont ici protégées. Dans le reste du pays elle sont souvent braconnées dans le but de revendre leur laine, la fibre textile la plus chère du monde. Au sein de ce parc ces animaux sont protégés mais une fois par an, les habitants du parc sont autorisés, lors d'une grande fête, à les rassembler (attention,elles courrent vite !) puis à les tondre avant de les remettre en liberté.
La vallée de Colca possède des paysages surprenants, les petits villages sont disséminés parmi d'immenses cultures en terrasses, et petit à petit nous montons en altitude. Heureusement nous respirons sans problèmes, peut-être grâce au maté de coca que nous nous avons bu lors d'un des arrêts.
La route continue en lacets à travers de beaux paysages et nous croisons cette fois des troupeaux de lamas et alpagas. Ceux-ci sont domestiqués et les propriétaires, comme souvent en Amérique du Sud, leur ont accroché de petits bouts de laine au bout des oreilles afin de les distinguer, ça nous fait toujours autant sourire !
Les paysages défilent par la vitre, très secs, sous le ciel toujours très bleu et pur de l'Altiplano.
Partis d'Arequipa qui se situe à un peu plus de 2300m d'altitude, nous ne sommes plus très loin maintenant du point le plus haut de ce trajet, soit Patapampa à 4910m ! Nous nous arrêtons un peu auparavant afin de nous acclimater, ce qui est également l'occasion d'approcher les lamas et un glacier. Malgré l'altitude élevée et la présence de volcans dont les cimes dépassent parfois les 6000m d'altitude, faute au réchauffement climatique, il est de plus en plus rare de voir de la glace ou de la neige ici. Ceci pose de gros problèmes pour l'agriculture car dans quelques années les cultures en terrasse risquent de ne plus être irriguées par l'eau provenant essentiellement de la fonte des neiges...
A proximité du col de Patapampa sont dressées de nombreuses apachatas, des amoncellements de pierre destinées aux divinités de la montagne.
Caché parmi les rochers, un petit vizcacha, petit mammifère de la famille du chinchila ressemblant à un lapin mais possédant une queue d'écureuil, nous observe sans appréhension apparente.
Après environ quatre heures de route, le village de Chivay apparaît en contrebas dans un très bel environnement de cultures en terrasses et de hautes montagnes.
Nous déjeûnons dans l'un des restaurants du village et arpentons un peu les rues de celui-ci, agréable village quoique pauvre tout en étant très touristique. Certains journalistes du National Geagraphic affirment que la vraie source du fleuve Amazone serait le volcan Nevado Mismi situé à une quinzaine de kilomètres de Chivay. D'après eux le rio Apurimacc qui naît ici et se jette ensuite dans l'Ucayali, ce dernier formant l'Amazone en se joignant au rio Marañon venu d'Equateur, serait la vraie branche qui mène à la source de ce fleuve, mais cette version est contestée par d'autres...
Après avoir déposé nos affaires à l'hôtel nous partons en direction de Coporaque, petit village typique de la vallée de Colca d'où démarre un chemin menant à des tombes pré-incas. Mais ces tombes ne sont en fait qu'un pretexte à une très belle marche permettant de découvrir des vues magnifiques sur les cultures en terrasses tout en observant le travail dans les champs des Péruviens.
Pourtant la plupart des Péruviens que nous croisons sont ceux qui nous attendent aux points de vue pour nous proposer leur artisanat et vêtements en laine d'alpaga. Cela ne nous dérange pas, par contre la présence d'enfants habillés traditionnellement et posant avec un lama pour les touristes nous est assez indigeste... A tous les arrêts ils sont là à dire "photos photos" et à prendre la pause en échange d'un ou deux pesos. Mais le pire bien sûr ce sont les touristes qui acceptent quasi-systématiquement et permettent de ce fait à cette pratique de se développer davantage encore. Pour notre part, une fois nous aura suffit... Bienvevus au Pérou supra-touristique, où désormais les touristes monnayent les photos d'enfants et où de ce fait ceux-ci vous disent photo avant bonjour... Bien sûr, quand on leur demande ils nous disent qu'ils vont aussi à l'école, mais rien n'est moins sûr tant ils sont formatés à répondre ce qui nous fait plaisir pour nous déculpabiliser...
Allez, laissons ces enfants en paix et profitons plutôt des paysages, très beaux et reposants (deux heures de marche facile environ) .
Nous voici arrivés aux quelques sépultures pré-incas (époque que l'on situe avant l'an 1300 ap.J.C., période où vécurent différentes communautés) creusées au milieu des rochers et qui se situent non pas au sommet de la montagne (privilège réservé aux personnes très nobles et aux Incas) mais un peu plus bà s. Les archéologues sont sûrs que ces sépultures ne sont pas Icas car les ouvertures ne sont pas tournées vers l'est comme les firent systématiquement les Incas plus tard.
Après la descente, nous rejoignons en bus les bains de la Calera. L'environnemment n'est pas très chouette, en revanche il est super agréable de se tremper dans ces eaux à plus de 40 degrés, génial pour se délasser après la route et la marche !
Le soir, le guide a réservé pour nous dans un restaurant touristique avec spectacle de danses, on s'en serait bien passé... Des touristes partout et une représentation de danses traditionnelles avec un groupe qui joue (flûte de pan et charango évidemment !), ouais, on aurait préféré un petit troquet avec ambiance un peu plus locale... Heureusement les Péruviens ont beaucoup d'humour et leur spectacle reprenant les danses effectuées en l'honneur de la Pachamama (la Terre-Mère, très vénérée car protectrice de la nature, des cultures...) est plutôt sympa.
Réveil à 5h le lendemain car les condors ont l'habitude de voler très tôt à la Cruz del Condor, croix dominant le canyon de Colca et située à environ deux heures de route (cahotique) de Chivay. Le trajet est encore plus beau que la veille, les cultures en terrasses s'étendent sur des dizaines de kilomètres ici. Nous qui avions peur d'être déçus par les paysages, franchement non ! Ici aussi se trouvent des sépultures pré-incas, on aperçoit distinctement les niches au milieu des falaises. Certains archéologues pensent que les pré-incas montaient des échaffaudages jusque là , d'autres que la montagne était alors accessible à pied et qu'un glissement de terrain aurait ensuite rendu ces tombes difficiles d'accès, mais rien n'est sûr quant à la méthode utilisée pour creuser ces sépultures...
Ca y est, nous arrivons au canyon de Colca, le plus profond du monde avec un dénivelé de 3200m, canyon qui s'étend sur plus de 100 kilomètres. Pourtant il y a polémique entre les Péruviens affirmant que ce canyon est le plus profond du monde et d'autres le réfutant, pretextant qu'il faut prendre en compte les deux versants du canyon et non seulement le plus élevé, et qu'à ce titre le Grand Canyon du Colorado est gagnant avec ses 1615m de haut (des deux côtés...) Bref, une chose est sûre, les deux valent le détour (même si le Grand Canyon est bien plus impressionnant...).
Nous marchons environ trois quart d'heure sur la crête du canyon jusqu'à rejoindre la Cruz del Condor et le temps s'arrête lorsque les premiers condors, oiseaux sacrés des Andes, arrivent et planent au dessus de nos têtes. Nous n'en avions jamais vu d'aussi près, ils passent parfois à quelques mètres seulement de nous ! Nous en compterons jusqu'à 12 en même temps, conscients d'avoir de la chance d'être ici durant la saison sèche, période où il est le plus probable de les observer.
Les plus beaux sont à nos yeux les condors adultes de couleur noire et blanche. En effet, les jeunes ont encore un pelage marron qui changera de couleur plus tard. Adultes, ces animaux pèsent entre dix et seize kilos, et mesurent de 100 à 122cm pour une envergure des ailes de 274 à 310 cm...
Ces magnifiques rapaces symbolisant le monde des Dieux pour les Incas (animal sacré avec le puma symbolisant la Terre, soit le monde terrestre, et le serpent symbolisant le monde-souterrain, le monde des morts) voleront plus d'une heure sous les exclamations enthousiastes des dizaines de touristes (non non, nous ne sommes pas seuls... mais le monde ne gâche rien à cet instant).
Allez, demi-tour en direction de Chivay, non sans s'arrêter à divers miradors dévoilant de belles vues sur les cultures en terrasses sculptées dans la montagne. A chaque arrêt nous attendent les Péruviennes tissant la laine d'alpaga tout en tenant de petits stands d'artisanat ou de fruits plutôt acides. Toutes portent des jupes colorées et brodées et des chapeaux différents selon la tribu à laquelle elles apppartiennent.
Nous nous arrêtons ensuite dans un petit village bien mignon, le village de Maca qui abrite une jolie petite église restaurée récemment suite à un violent tremblement de terre (le village est situé sur une faille sismique) qui a fait beaucoup de dégâts en 1991.
Malheureusement les habitants de ce village, en plus des photos traditionnelles avec lama, proposent aux touristes de prendre les rapaces sur leurs épaules. Le problème est qu'en ayant apprivoisé ces animaux à l'origine sauvage ils les privent ainsi, petit à petit, de leur instinct et de la pérennité de leur espèce, de plus en plus en danger...
Nous déjeûnons à Chivay et visitons ce village agréable où vivent de nombreux Indiens avec leurs costumes si étranges et dépaysants pour nous.
La route de retour est longue, de plus il fait très chaud dans le minibus. Heuerusement nous avons sympathisé avec un couple de Québecois très agréables (mais c'est un pléonasme, on a jamais rencontré de Québécois désagréables !) et le temps passe finalement, nous voici de retour vers 17h à Arequipa, où nous passerons une journée de plus (cf. étape précédente).